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Le dangereux déclin de la nature


Résumé du rapport de l’IPBES – Plateforme Intergouvernementale Scientifique et Politique sur la Biodiversité et les Services Écosystémiques – paru le 4 mai 2019.

Lors de sa session plénière, qui s’est déroulée à Paris du 29 avril au 4 mai 2019, l’IPBES a prôné un changement transformateur.
La nature décline globalement à un rythme sans précédent dans l'histoire humaine et le taux d’extinction des espèces s’accélère, provoquant dès à présent des effets graves sur les populations humaines du monde entier, alerte l’IPBES dans son rapport d’évaluation mondiale sur la biodiversité et les services écosystémiques, qui est le document le plus exhaustif réalisé à ce jour. Il s’agit du premier rapport intergouvernemental de ce type.

Élaboré par 145 experts issus de 50 pays au cours des trois dernières années, avec des contributions additionnelles apportées par 310 autres experts, le rapport évalue les changements au cours des cinq dernières décennies et fournit un aperçu complet de la relation entre les trajectoires de développement économique et leurs impacts sur la nature. Il propose également un éventail de scénarios possibles pour les décennies à venir.

Basé sur une revue systématique d'environ 15 .000 références scientifiques et sources gouvernementales, le rapport s’appuie aussi et pour la première fois à une telle échelle, sur les savoirs autochtones et locaux.

" Les preuves accablantes contenues dans l’évaluation globale publiée par l’IPBES et obtenues à partir d'un large éventail de domaines de connaissance, présentent un panorama inquiétant ", a déclaré le président de l’IPBES, Sir Robert Watson. " La santé des écosystèmes dont nous dépendons, ainsi que toutes les autres espèces, se dégrade plus vite que jamais. Nous sommes en train d’éroder les fondements mêmes de nos économies, nos moyens de subsistance, la sécurité alimentaire, la santé et la qualité de vie dans le monde entier ".

" Les contributions apportées par la biodiversité et la nature aux populations sont notre patrimoine commun et forment le plus important filet de sécurité pour la survie de l'humanité. Mais ce filet de sécurité a été étiré jusqu'à son point de rupture ", a déclaré la professeure Sandra Díaz (Argentine), qui a co-présidé l'évaluation avec les professeurs Josef Settele (Allemagne) et Eduardo S. Brondízio (Brésil et ÉtatsUnis). " La diversité au sein des espèces, entre les espèces et celles des écosystèmes, ainsi que de nombreuses contributions fondamentales qui proviennent de la nature, se dégrade rapidement, même si nous avons encore les moyens d'assurer un avenir durable aux êtres humains et à la planète ". 

Le rapport estime qu’environ 1 million d'espèces animales et végétales sont aujourd'hui menacées d'extinction, notamment au cours des prochaines décennies, ce qui n’a jamais eu lieu auparavant dans l'histoire de l’humanité.

Depuis 1900, l'abondance moyenne des espèces locales dans la plupart des grands habitats terrestres a diminué d'au moins 20% en moyenne. Plus de 40% des espèces d’amphibiens, près de 33% des récifs coralliens et plus d'un tiers de tous les mammifères marins sont menacés. La situation est moins claire pour les espèces d'insectes, mais les données disponibles conduisent à une estimation provisoire de 10% d’espèces menacées. Au moins 680 espèces de vertébrés ont disparu depuis le 16ème siècle et plus de 9% de toutes les races domestiquées de mammifères utilisées pour l’alimentation et l’agriculture avaient disparu en 2016, et 1.000 races de plus sont menacées.


" Les écosystèmes, les espèces, les populations sauvages, les variétés locales de plantes et les races locales d’animaux domestiques diminuent, se réduisent ou disparaissent. Le tissu vivant de la Terre, essentiel et interconnecté, se réduit et s’effiloche de plus en plus ", a déclaré le professeur Settele. " Cette perte est la conséquence directe de l'activité humaine et constitue une menace directe pour le bien-être de l’humanité dans toutes les régions du monde. "

Le rapport souligne que, depuis 1980, les émissions de gaz à effet de serre ont été multipliées par deux, provoquant une augmentation des températures moyennes mondiales d'au moins 0,7 degré Celsius. Le changement climatique a déjà un impact sur la nature, depuis le niveau des écosystèmes jusqu’à celui de la diversité génétique, impact qui devrait augmenter au cours des décennies à venir et, dans certains cas, surpasser l'impact dû au changement d’usage des terres et de la mer et des autres facteurs de pression.

" Pour mieux comprendre et, plus important encore, pour s’attaquer aux principales causes des dommages causés à la biodiversité et aux contributions apportées par la nature aux populations, nous devons comprendre l'histoire et les interconnections mondiales qui existent entre les facteurs indirects complexes de changement démographiques et économiques, ainsi que les valeurs sociales qui les soustendent ", a déclaré le professeur Brondízio. 

Les principaux facteurs sont l’augmentation de la population et de la consommation par habitant, l'innovation technologique et les questions de gouvernance et de responsabilité. 

Le rapport pointe des impacts majeurs : 

-  Les trois quarts de l'environnement terrestre et environ 66% du milieu marin ont été significativement modifiés par l’action humaine. En moyenne, ces tendances ont été moins graves, ou évitées, dans les zones qui appartiennent à, ou sont gérées par, des peuples autochtones et des communautés locales. 

-  Plus d'un tiers de la surface terrestre du monde et près de 75% des ressources en eau douce sont maintenant destinées à l’agriculture ou à l’élevage. 

-  La valeur de la production agricole a augmenté d'environ 300% depuis 1970, la récolte de bois brut a augmenté de 45% et environ 60 milliards de tonnes de ressources renouvelables et non renouvelables sont maintenant extraites chaque année dans le monde - quantité qui a presque doublé depuis 1980. 

-  La dégradation des sols a réduit de 23% la productivité de l’ensemble de la surface terrestre mondiale ; une partie de la production agricole annuelle mondiale, d’une valeur marchande pouvant atteindre 577 milliards de US dollars, est confrontée au risque de disparition des pollinisateurs et de 100 à 300 millions de personnes sont exposées à un risque accru d'inondations et d’ouragans en raison de la perte d'habitats côtiers et de leur protection.

 -  En 2015, 33% des stocks de poissons marins ont été exploités à des niveaux non durables ; 60% l’ont été au niveau maximum de pêche durable, et seulement 7% à un niveau inférieur à celui estimé comme étant durable. 

- Les zones urbaines ont plus que doublé depuis 1992. 

-  La pollution par les plastiques a été multipliée par dix depuis 1980 ; environ 300 à 400 millions de tonnes de métaux lourds, solvants, boues toxiques et autres déchets issus des sites industriels sont déversées chaque année dans les eaux du monde, et les engrais qui arrivent dans les écosystèmes côtiers ont produit plus de 400 " zones mortes " dans les océans, ce qui représente environ 245.000km2, soit une superficie totale plus grande que le Royaume-Uni.

Les tendances négatives de la nature continueront jusqu’en 2050 et au-delà, dans tous les scénarios politiques explorés dans le rapport, sauf dans ceux qui proposent un changement transformateur.  

Le rapport de l’IPBES souligne combien il est important, entre autres, d'adopter une gestion intégrée et des approches intersectorielles qui prennent en compte les compromis entre la production alimentaire et celle de l’énergie, les infrastructures, la gestion de l’eau douce et des zones côtières, ainsi que la conservation de la biodiversité.

Quelques chiffres relevés dans le rapport de l’IPBES

 -  60 milliards : tonnes de ressources renouvelables et non renouvelables extraites dans le monde chaque année, en hausse de près de 100% depuis 1980 (586587).  

-  15% : augmentation de la consommation mondiale par habitant de matériaux depuis 1980. 

-  87% : pourcentage des zones humides présentes au 18ème siècle qui ont été perdues en 2000

 - la perte de zones humides est actuellement trois fois plus rapide, en termes de pourcentage, que la perte de forêts.

 -  8 millions : nombre total estimé d'espèces animales et végétales sur la Terre (y compris 5,5 millions d'espèces d'insectes). 

-  1 million : nombre d’espèces menacées d'extinction, dont de nombreuses au cours des prochaines décennies.

 -  40 % : pourcentage des espèces d'amphibiens menacées d'extinction. -  33% : des récifs coralliens, des requins et des espèces proches, et des mammifères marins sont menacés d'extinction. 

-  25%  : pourcentage moyen des espèces menacées d'extinction chez les vertébrés terrestres, d'eau douce et marins, les invertébrés et les plantes qui ont été étudiés de manière détaillée.

 -  680 : espèces de vertébrés qui ont disparu à cause de l’action de l’homme depuis le 14ème siècle. -  300% : augmentation de la production des cultures vivrières depuis 1970. 

-  75% : types de cultures vivrières mondiales dépendent de la pollinisation par les animaux. 

-  235 à 577 milliards de USD : montant annuel de la production agricole mondiale en péril en raison de la disparition des pollinisateurs.

-  11 % de la population mondiale est sous-alimentée. 

-  100 millions d’hectares : expansion agricole dans les régions tropicales de 1980 à 2000, principalement due à l'élevage du bétail en Amérique latine, et aux plantations en Asie du Sud-Est. La moitié de cette expansion s’est faite au détriment de forêts tropicales intactes. 

-  33% : surface terrestre du monde consacrée à la culture ou à l’élevage. 

-  75% : ressources en eau douce, consacrées à la culture ou à l’élevage. 

-  12% : terres émergées non couvertes par les glaces, utilisées dans le monde pour la production agricole. -  25% : terres émergées non couvertes par les glaces, utilisées pour le pâturage. 

-  25% : émissions de gaz à effet de serre causées par le défrichement, la production agricole et la fertilisation. La production de nourriture d'origine animale contribue à 75% de ce chiffre. 

-  30% : production agricole mondiale et offre alimentaire mondiale fournies par de petites exploitations inférieures à 2 hectares, qui utilisent 25% des terres agricoles, et conservent généralement une agro biodiversité riche.

-  29% : exploitations agricoles mettant en œuvre des pratiques de production agricole durable dans le monde entier. Elles représentent 9% de toutes les terres agricoles.

 -  100 milliards de dollars US : niveau estimé du soutien financier fourni par les pays de l'OCDE (2015) à un type d’agriculture potentiellement nocif pour l'environnement.

 -  33% : stocks de poissons marins en 2015, exploités à un niveau biologiquement non durable. -  55% : zone océanique exploitée par la pêche industrielle. 

-  45%  : augmentation de la production de bois brut depuis 1970 (4 milliards de mètres cubes en 2017).

 -  50% : expansion agricole qui a eu lieu au détriment des forêts. -  2 milliards : nombre de personnes qui utilisent le bois comme combustible pour répondre à leurs besoins en énergie primaire. 

-  100% : croissance des zones urbaines depuis 1992. 

-  105%  : augmentation de la population humaine mondiale (de 3,7 à 7,6 milliards) depuis 1970.

 - 2.500 :conflits pour les combustibles fossiles, l'eau, la nourriture et la terre actuellement en cours dans le monde. 

- 4 milliards : personnes dépendant principalement des médecines naturelles.

- 17%  : pourcentage de maladies infectieuses propagées par des vecteurs animaux, causant plus de 700.000 décès par an. 

- 821 millions : personnes confrontées à l'insécurité alimentaire en Asie et en Afrique.

- 40% : population mondiale n'ayant pas accès à de l'eau potable propre et salubre.

- 80% : eaux usées mondiales rejetées non traitées dans l'environnement.

- 10 fois : augmentation de la pollution plastique depuis 1980.

- 3 mm : élévation annuelle moyenne du niveau de la mer dans le monde au cours des deux dernières décennies.

- 40 % : augmentation de l'empreinte carbone du tourisme de 2009 à 2013 (4,5 Gt de dioxyde de carbone).

- 8% : émissions totales de gaz à effet de serre provenant des transports et de la consommation alimentaire liée au tourisme.